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"La Miséricorde de Dieu est pour tous" - Pape François

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billetmois2023-2

Carême La Miséricorde non une sorte de bonasserie mais une tendresse active

Un Carême suit toujours la ligne des crêtes. Sur la montagne, avec quelques disciples, il nous donne à voir la beauté divine dans le corps du Christ transfiguré. (…) Il nous conduit plus loin encore dans l’investigation du mystère de Dieu ; il nous donne de toucher sa miséricorde*.

Le mot, je le sais, est dévalué. On pourrait dire même que l’idée en est polluée. « Parler de miséricorde, c’est entendre aussitôt une sorte de bonasserie, de complaisance, voire peut-être de lâcheté, au mieux d’indulgence, mais qui seraient monnayées par un déficit de rigueur, de vérité et de justice » (Bernard Bro). Or, rien n’est plus proprement chrétien qu’elle. On serait en peine de trouver quelque chose de semblable dans une autre religion. La miséricorde est le mot-clé de la mission du Christ. Elle nous élève jusqu’à un nouveau sommet : le cœur de Dieu.

Un Père et ses fils. Le Père est Dieu : il faut être saint pour partager son intimité. Les deux fils auront à réaliser cet apprentissage-là, comme chacun de nous.

Un double recrutement

Le poète nous en prévient : « Il y a deux races, il y a deux recrutements. Il y a un double recrutement des saints qui sont dans le Ciel. Il y a deux extractions. Il y a ceux qui sortent des jutes, il y a ceux qui sortent des pécheurs » (Charles Péguy).

Il y a l’homme de la jeunesse et de l’enthousiasme. La régularité lui pèse, la famille l’étouffe, il part. Il tente l’aventure. Il rêve d’expériences inédites. C’est plus fort que lui ; qui songerait à le lui reprocher ? « Il réclame la part qui lui revient et s’en va dans un pays lointain ».

Il y a l’aîné. Très tôt, trop tôt peut-être, on s’est reposé sur lui. On lui a fait confiance, on lui a confié les affaires. Il est devenu l’homme du calcul, il s’est attaché à son devoir. Qui songerait à le lui reprocher ? Ne fallait-il pas continuer l’entreprise familiale ? Lui reste et « travaille dans les champs ».

Deux hommes donc, tous deux appelés à la même sainteté, et pourtant si dissemblables, l’aîné et le prodigue, le proche et le lointain le juste et le pécheur, le juif et le païen, si peu frères, si peu fils !

Le Père parfait

La miséricorde montre ici son premier visage, ce que j’appellerai son versant viril. Que fait le Père ? Rien. Et c’est en cela qu’il se montre véritablement Père, Père parfait. Lorsque le plus jeune lui réclame sa part, il ne prononce aucun reproche, aucune mise en garde. Rien, pas un mot. Il sait, bien sûr, que son enfant se trompe. Il sait qu’il souffrira beaucoup, et que lui-même en souffrira, davantage encore. Silencieusement, il partage des biens et donne au plus jeune ce qui lui revient.

Il sait tout autant que l’aîné tien son livre ce comptabilité avec la plus grande rigueur. A la moindre occasion, celui-ci l’ouvrira sous son nez, faisant valoir ses heures de service et la longue liste des mérites reconnus. Lui aussi réclamera la part qui lui revient, la plus grande, bien sûr. Le Père ne s’en étonne pas : « Tout ce qui est à moi est déjà à toi ».

Notons au passage à quel point Jésus secoue nos « familles-cocons ». Il dénonce toutes les formes du dirigisme, de la plus autoritaire à la plus subtile, par lequel les parents se forgent des enfants à leur  image et tentent de réaliser à travers aux, malgré eux parfois, leurs propres aspirations.

Le désir de « vivre sa vie »

Ce que nous appelons miséricorde commence par une fidélité à soi-même. Le Père se doit de rester Père. Ses enfants sont de lui, mais non pas à lui. Il sait que les conseils s’avèrent dérisoires, lorsqu’ils rencontrent ce formidable instinct, ce désir irrésistible, ce désir irrépressible, plus puissant que tout, de « vivre sa vie ». Le Père sait que l’on ne peut jamais se mettre à la place d’autrui, malgré ce que nous pouvons en dire, pas même de ceux qui sont les plus proches, surtout pas de ceux qui sont les plus proches ! Sa fidélité à son rôle de Père lui impose une infinie délicatesse et un respect total de la liberté de l’autre, même si ce dernier se trompe, même s’il expose sa vie – « il n’avait plus de quoi se nourrir –, même s’il fait mal.

Un point mystérieux


Le Père sait et son cœur saigne.

La miséricorde livre alors un second visage, sa face féminine en quelque sorte. Pour reprendre encore les images du poète, dans le cœur du Père existe un « point de douleur, point de détresse, point d’espérance. Point douloureux, point d’inquiétude, un point de cicatrice, un point de couture et de cicatrisation » (Charles Péguy). Lorsque la souffrance de l’enfant, son mal ou son malheur, appuie sur ce point, il en jaillit une émotion unique. Nous l’appelons du mot magnifique de miséricorde ; elle n’est pas autre chose que ce mouvement des entrailles qui pousse la mère au-devant de son enfant en péril. En elle, pas l’ombre d’une hésitation, mais au contraire une tendresse terriblement active. Le Père ne se résigne ni au départ de l’un, ni à la fermeture de l’autre. Il surveille. Du plus loin, s’il aperçoit le moindre signe, même grossier, même ambigu, il se précipite. Vite : voilà le mot d’ordre ! Vite ! Il prend le prodigue dans ses bras et ne le laisse pas achever le discours qu’il avait ruminé dans sa tête. Vite ! Il sort de sa maison et supplie son aîné d’en franchir le seuil, afin de se mêler à la fête.

La miséricorde devient ainsi un amour qui ne supporte pas  tout ce qui fait souffrir et tout ce qui fait mal. Elle dépasse la simple justice. Elle accorde au pécheur une nouvelle chance, inlassablement.

Tel Père, tels fils. Ce point mystérieux, de douleur et de tendresse, ce point de miséricorde, n’existe pas seulement dans le cœur du Père, mais bien au plus profond de chacun de nous. Le Carême est là pour le réveiller. Il lui fait toucher la souffrance d’autrui, et nous invite à partager notre bien, notre temps et notre prière.

Il le rend aussi sensible à notre propre malheur, à notre péché. « Nous vous en supplions, disait saint Paul, laissez-vous réconcilier avec le Christ». C’est lui le vrai Fils aîné, le Fils parfait. Il nous conduit au Père. Il nous ouvre la porte : « Entrez, la fête a déjà commencé ».

P. Jean-Louis Brugues, o.p., dimanche 29 mars 1992, Abbaye Sainte Scholastique à Dourgne – Homélies radiodiffusées

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* Lc 15, 1-3.11-32



billetmois2023-2

Carême La Miséricorde non une sorte de bonasserie mais une tendresse active

Un Carême suit toujours la ligne des crêtes. Sur la montagne, avec quelques disciples, il nous donne à voir la beauté divine dans le corps du Christ transfiguré. (…) Il nous conduit plus loin encore dans l’investigation du mystère de Dieu ; il nous donne de toucher sa miséricorde*.

Le mot, je le sais, est dévalué. On pourrait dire même que l’idée en est polluée. « Parler de miséricorde, c’est entendre aussitôt une sorte de bonasserie, de complaisance, voire peut-être de lâcheté, au mieux d’indulgence, mais qui seraient monnayées par un déficit de rigueur, de vérité et de justice » (Bernard Bro). Or, rien n’est plus proprement chrétien qu’elle. On serait en peine de trouver quelque chose de semblable dans une autre religion. La miséricorde est le mot-clé de la mission du Christ. Elle nous élève jusqu’à un nouveau sommet : le cœur de Dieu.

Un Père et ses fils. Le Père est Dieu : il faut être saint pour partager son intimité. Les deux fils auront à réaliser cet apprentissage-là, comme chacun de nous.

Un double recrutement

Le poète nous en prévient : « Il y a deux races, il y a deux recrutements. Il y a un double recrutement des saints qui sont dans le Ciel. Il y a deux extractions. Il y a ceux qui sortent des jutes, il y a ceux qui sortent des pécheurs » (Charles Péguy).

Il y a l’homme de la jeunesse et de l’enthousiasme. La régularité lui pèse, la famille l’étouffe, il part. Il tente l’aventure. Il rêve d’expériences inédites. C’est plus fort que lui ; qui songerait à le lui reprocher ? « Il réclame la part qui lui revient et s’en va dans un pays lointain ».

Il y a l’aîné. Très tôt, trop tôt peut-être, on s’est reposé sur lui. On lui a fait confiance, on lui a confié les affaires. Il est devenu l’homme du calcul, il s’est attaché à son devoir. Qui songerait à le lui reprocher ? Ne fallait-il pas continuer l’entreprise familiale ? Lui reste et « travaille dans les champs ».

Deux hommes donc, tous deux appelés à la même sainteté, et pourtant si dissemblables, l’aîné et le prodigue, le proche et le lointain le juste et le pécheur, le juif et le païen, si peu frères, si peu fils !

Le Père parfait

La miséricorde montre ici son premier visage, ce que j’appellerai son versant viril. Que fait le Père ? Rien. Et c’est en cela qu’il se montre véritablement Père, Père parfait. Lorsque le plus jeune lui réclame sa part, il ne prononce aucun reproche, aucune mise en garde. Rien, pas un mot. Il sait, bien sûr, que son enfant se trompe. Il sait qu’il souffrira beaucoup, et que lui-même en souffrira, davantage encore. Silencieusement, il partage des biens et donne au plus jeune ce qui lui revient.

Il sait tout autant que l’aîné tien son livre ce comptabilité avec la plus grande rigueur. A la moindre occasion, celui-ci l’ouvrira sous son nez, faisant valoir ses heures de service et la longue liste des mérites reconnus. Lui aussi réclamera la part qui lui revient, la plus grande, bien sûr. Le Père ne s’en étonne pas : « Tout ce qui est à moi est déjà à toi ».

Notons au passage à quel point Jésus secoue nos « familles-cocons ». Il dénonce toutes les formes du dirigisme, de la plus autoritaire à la plus subtile, par lequel les parents se forgent des enfants à leur  image et tentent de réaliser à travers aux, malgré eux parfois, leurs propres aspirations.

Le désir de « vivre sa vie »

Ce que nous appelons miséricorde commence par une fidélité à soi-même. Le Père se doit de rester Père. Ses enfants sont de lui, mais non pas à lui. Il sait que les conseils s’avèrent dérisoires, lorsqu’ils rencontrent ce formidable instinct, ce désir irrésistible, ce désir irrépressible, plus puissant que tout, de « vivre sa vie ». Le Père sait que l’on ne peut jamais se mettre à la place d’autrui, malgré ce que nous pouvons en dire, pas même de ceux qui sont les plus proches, surtout pas de ceux qui sont les plus proches ! Sa fidélité à son rôle de Père lui impose une infinie délicatesse et un respect total de la liberté de l’autre, même si ce dernier se trompe, même s’il expose sa vie – « il n’avait plus de quoi se nourrir –, même s’il fait mal.

Un point mystérieux


Le Père sait et son cœur saigne.

La miséricorde livre alors un second visage, sa face féminine en quelque sorte. Pour reprendre encore les images du poète, dans le cœur du Père existe un « point de douleur, point de détresse, point d’espérance. Point douloureux, point d’inquiétude, un point de cicatrice, un point de couture et de cicatrisation » (Charles Péguy). Lorsque la souffrance de l’enfant, son mal ou son malheur, appuie sur ce point, il en jaillit une émotion unique. Nous l’appelons du mot magnifique de miséricorde ; elle n’est pas autre chose que ce mouvement des entrailles qui pousse la mère au-devant de son enfant en péril. En elle, pas l’ombre d’une hésitation, mais au contraire une tendresse terriblement active. Le Père ne se résigne ni au départ de l’un, ni à la fermeture de l’autre. Il surveille. Du plus loin, s’il aperçoit le moindre signe, même grossier, même ambigu, il se précipite. Vite : voilà le mot d’ordre ! Vite ! Il prend le prodigue dans ses bras et ne le laisse pas achever le discours qu’il avait ruminé dans sa tête. Vite ! Il sort de sa maison et supplie son aîné d’en franchir le seuil, afin de se mêler à la fête.

La miséricorde devient ainsi un amour qui ne supporte pas  tout ce qui fait souffrir et tout ce qui fait mal. Elle dépasse la simple justice. Elle accorde au pécheur une nouvelle chance, inlassablement.

Tel Père, tels fils. Ce point mystérieux, de douleur et de tendresse, ce point de miséricorde, n’existe pas seulement dans le cœur du Père, mais bien au plus profond de chacun de nous. Le Carême est là pour le réveiller. Il lui fait toucher la souffrance d’autrui, et nous invite à partager notre bien, notre temps et notre prière.

Il le rend aussi sensible à notre propre malheur, à notre péché. « Nous vous en supplions, disait saint Paul, laissez-vous réconcilier avec le Christ». C’est lui le vrai Fils aîné, le Fils parfait. Il nous conduit au Père. Il nous ouvre la porte : « Entrez, la fête a déjà commencé ».

P. Jean-Louis Brugues, o.p., dimanche 29 mars 1992, Abbaye Sainte Scholastique à Dourgne – Homélies radiodiffusées

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* Lc 15, 1-3.11-32



 
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